L'auteur et l'oeuvre
Cormac McCarthy est un écrivain américain né en 1933. Il publie La Route en 2006 aux États-Unis. Le livre sera récompensé notamment du prix Pulitzer de la fiction en 2007. C’est en 2008 qu’il sera publié en France.
Voici ce qu’en dit la quatrième de couverture :
« L’apocalypse a eu lieu. Le monde est dévasté, couvert de cendres et de cadavres. Parmi les survivants, un père et son fils errent sur une route, poussant un caddie rempli d’objets hétéroclites. Dans la pluie, la neige et le froid, ils avancent vers les côtes du Sud, la peur au ventre : des hordes de sauvages cannibales terrorisent ce qui reste de l’humanité. Survivront-ils à leur voyage ? »
Ma découverte de l'oeuvre
J’ai découvert ce roman grâce à un article de Martin Gibert et Morgane Paris, deux philosophes spécialistes de l’éthique. Dans cet article, intitulé « L’imagination et les biais de l’empathie », les auteurs exposent le rôle éthique de l’empathie, expliquent les différents biais empathiques et partent d’une hypothèse : l’imagination pourrait permettre de « débiaiser » nos biais empathiques. Ils citent quelques oeuvres qui pourraient avoir cet effet, et notamment La Route de Cormac McCarthy.
« C’est un roman d’anticipation, dans un monde où la catastrophe écologique a eu lieu, qui présente un père et son fils d’une façon très juste et incarnée : le texte produit habituellement chez ses lecteurs des représentations mentales suffisamment robustes pour déclencher une véritable empathie. »
Ce type de fiction pourrait permettre de développer l’empathie envers les générations futures, c’est-à-dire des humains qui ne sont pas encore nés. Ces humains pourraient vivre ce que vivent l’homme et son fils dans La Route.
Les caractéristiques de La Route
S’agissant du fond, le livre ouvre énormément de questions sur l’essentiel, la vie et son sens, l’humain et sa dignité, la vérité, le bien et le mal, le temps, Dieu, l’amour, etc. Ces questions ne sont pas explicitement posées, mais elles nous viennent à l’esprit.
Je ne vais pas m’attarder sur l’histoire en elle-même. Je crois que la quatrième de couverture est suffisamment claire. Lorsque l’on se lance dans cette lecture, il faut tout de même savoir qu’il y a peu d’action, du moins pas comme l’on pourrait s’y attendre en lisant une fiction post-apocalyptique. J’ai lu plusieurs avis de lecteurs se plaignant de ce manque. Je me suis, moi, focalisée sur autre chose durant ma lecture. Je m’intéresse à l’empathie et à son développement via l’imagination, il est donc important pour moi de lire ce type d’oeuvre.
Ce qui m’a vraiment marquée dans ce roman, c’est sa forme. Elle en fait un objet assez particulier et original. C’est également, selon moi, ce qui permet de ressentir de l’empathie pour les personnages.
Les personnages de La Route
Le texte donne peu d’informations sur les personnages. Nous savons simplement qu’il s’agit d’un homme appelé « l’homme », et de son fils appelé « le petit » ou « l’enfant ». Nous ne connaissons ni leur prénom ni leur âge. Or en Occident, l’humain est « humanisé », inséré dans une société à sa naissance, lorsqu’il reçoit son prénom et son nom. L’on comprend donc que ces deux personnages sont déshumanisés, présentés dans leur essence dépouillée.
Toutefois, je trouve le personnage de l’enfant assez intriguant. À mon sens, il représente à lui seul un questionnement permanent sur le bien et le mal. Il aimerait aider les personnes qu’ils croisent. Il attend de l’homme une certaine franchise et une fidélité à sa parole. L’enfant veut que son père lui dise la vérité sans essayer de l’épargner. Il y a vraiment un travail autour de la confiance dans la relation. Je crois aussi que, face aux actions du père, l’enfant incarne la recherche de sens, d’éthique et de morale.
La forme du texte
L’une des caractéristiques les plus frappantes de ce roman est qu’il n’y a pas de partie, de chapitre ou de titre. Le texte est composé de petits paragraphes qui se succèdent. Le style est dépouillé, assez sec. Il y a très peu de phrases à virgules, et une utilisation étonnante des « et » qui se succèdent dans certaines phrases.
Finalement, je crois que cette forme colle complètement à ce que vivent les personnages. On a le sentiment d’un temps saccadé, qui défile. Les moments de répit sont très rares. Tout s’enchaîne de manière assez mécanique, comme les jours et les nuits qui se succèdent. Les personnages ne font qu’enchaîner des actions par instinct de survie pour poursuivre leur route. Aussi, nous n’avons aucune idée des dates auxquelles se situe l’histoire. Une phrase du texte exprime bien cela, et nous parle de « l’anonyme jour gris ». Ainsi, la forme du récit représente ce froid, ce dépouillement, une forme d’économie, et le silence peut-être. Les mots disparaissent au même titre que le monde.
S’agissant des dialogues, il y a également une grande économie de mots. Les phrases sont très courtes. Ce sont parfois de simples échanges de mots entre le père et le fils.
Mon avis sur La Route
En conclusion, je rejoins les auteurs de l’article. Ce roman peut stimuler l’empathie, notamment envers les générations futures. Il nous plonge dans la peau de deux personnages qui tentent de survivre dans un monde complètement dévasté. Je suis arrivée à me mettre à la place des personnages assez facilement. J’ai ressenti beaucoup d’empathie pour le père en particulier, que l’on voit lutter avec acharnement pour la survie de son fils.
Je recommande ce roman, et je pense qu’il peut être lu à partir du lycée. Quant à moi, je vais peut-être enfin visionner l’adaptation cinématographique de l’oeuvre, sortie en 2009.
Vous pouvez retrouver le roman à la Fnac ici. Bonne lecture !